Expo.#6 – GALLERY A
–VU–
Eric Monbel – Eve Servent
du 05 Juin au 28 Juin 2025
Gallery A vous invite à découvrir VU une exposition de Eric Monbel et Eve Servent.
Ce que je n’ai pas dessiné, je ne l’ai pas vu. Quand le regard devient acte de présence.
La célèbre phrase de Goethe, « Ce que je n’ai pas dessiné, je ne l’ai pas vu », résonne avec une étonnante acuité dans le champ de la peinture contemporaine. Elle nous rappelle que voir véritablement suppose plus qu’un simple coup d’œil : cela implique un engagement profond du regard, une attention soutenue, une forme d’immersion.
Car en peinture, voir, c’est s’attarder. C’est explorer le sujet, s’interroger sur ce qu’il figure, ou justement, ce qu’il ne figure pas. C’est observer la gestuelle, la matière, la lumière, les dimensions, les détails et ce qui échappe au premier abord. Regarder devient un acte lent, parfois contemplatif, une manière de se rendre disponible à l’œuvre et de lui permettre de nous parler.
C’est à cette exigence du regard que répondent les œuvres d’Éric Monbel et d’Ève Servent. L’un par la densité de la peinture à l’huile, l’autre par la finesse du dessin, tous deux cherchent à faire émerger de la surface un mystère, une présence humaine à la fois tangible et insaisissable. Une figure, souvent étrange, presque spectrale, qui surgit de la matière comme un souffle enfoui.
Dans un monde saturé d’images, où celles-ci sont produites, diffusées et consommées à une vitesse affolante, au point d’en perdre leur fonction et leur sens. Ces artistes posent un acte de résistance. À rebours d’une époque qui confond art, décoration et publicité, leur travail invite à la lenteur, à la profondeur, à la sensation.
Un slogan aperçu sur la vitrine d’une chaîne de photographie commerciale proclame : « Votre œil est une œuvre d’art ! »ultime retournement de ce que Goethe désignait. Car si l’œil devient œuvre, que reste-t-il de l’œuvre elle-même ? L’objet regardé cède alors sa place à celui qui regarde, dans une inversion de la relation sensible qui vide le regard de son pouvoir.
Face à cette confusion généralisée, les œuvres de E.Monbel et E.Servent nous rappellent que voir, c’est se relier. C’est créer une tension, un dialogue silencieux entre soi et ce qui est là. Une peinture ne se donne pas immédiatement. Elle exige. Elle résiste. Mais à qui sait regarder, elle offre la chance rare de ressentir vraiment.
#JE DECOUVRE LE SITE GALLERY A
GALLERY A proposera ici 2 artistes de sa sélection :
De la matière à la mémoire, une peinture en chantier
Les peintures actuellement accrochés aux murs de la galerie sont le fruit d’un travail très récent, exposé ici pour la toute première fois. Si les œuvres sont nouvelles, les sources, elles, restent inchangées depuis plus de trente ans : un ancrage profond et indéfectible dans la peinture caravagesque du XVIIe siècle, le réalisme du XIXe, et l’histoire contemporaine dans ce qu’elle a de plus tragique, de plus humain aussi.
Pendant longtemps, l’iconographie guerrière a constitué une base récurrente : brancards, toiles de tentes militaires… Ces motifs sont aujourd’hui laissés de côté, remplacés par des formats plus réduits, plus intimes. Cette évolution modifie notre rapport à la peinture : nous ne sommes plus face à une scène imposante, mais plongés dans un espace resserré, presque tactile, où chaque geste de peinture devient visible, lisible, sensible.
C’est là que réside le cœur du processus, ce que j’appelle « le chantier » : un travail où il s’agit d’apposer, d’écraser, d’insister avec la matière sur le support jusqu’à ce que quelque chose surgisse. Une force, une présence, parfois fragile, parfois violente, mais toujours incertaine au départ.
Des œuvres comme Narcisses, ou les Lucioles illustrent bien cette démarche. Dans ces tableaux, des éléments picturaux, points, trames, textures se superposent au sujet principal, comme pour en retarder l’apparition ou en brouiller les contours. L’image se mérite, se cherche.
Les thèmes abordés ne sont pas étrangers à notre époque. Au contraire, ils l’évoquent de manière frontale, en résonance avec les désastres de l’Histoire et la bêtise, parfois hallucinante, du présent. Le recrutement, Le mouchoir, Les pierres ou encore les lavis représentant des canots de sauvetage — tous disent quelque chose de notre monde, sans slogan, sans discours, mais avec ce que seule la peinture peut transmettre : un tremblement, une tension, un silence.
Ce travail ne cherche pas à illustrer. Il ne cherche pas à séduire. Il cherche à faire surgir, dans la matière même, une trace sensible. Quelque chose qui parle, sans mots, de ce que nous voyons ou que nous refusons de voir.
Le regard comme miroir : mémoire, vulnérabilité et présence
Nos souvenirs colorent le prisme à travers lequel nous regardons.
Chaque regard porté sur une œuvre est traversé par une mémoire intime, souvent inconsciente. Regarder, c’est projeter, interpréter, associer et faire résonner ce que l’on voit avec ce que l’on a vécu. Ainsi, chaque regard devient unique. Chaque œuvre devient multiple.
Dans mes peintures, les personnages sont seuls. Ils apparaissent souvent dans des situations qui semblent dérobées à l’intimité, figés dans un moment suspendu. Le ou les autres sont hors champ, absents, ou peut-être simplement évincés. Ce vide, cette absence volontaire, crée un espace de projection pour le spectateur.
Les scènes ne livrent pas tout. Elles ne s’expliquent pas. Rien n’est dit, et pourtant quelque chose se joue, de l’ordre du rapport humain, de la tension invisible entre l’être et l’autre, même s’il est absent. Il est question ici de vulnérabilité, de cette faille partagée qui nous rend profondément humains.
Mon intention n’est pas d’imposer un récit, mais d’ouvrir un champ de questionnement. J’espère que celui qui regarde devienne plus qu’un simple observateur. Qu’il se sente à la fois voyeur et témoin. Qu’il ressente le trouble de cette position ambivalente. Et, peut-être, qu’il s’interroge sur sa propre manière de voir, de se souvenir, de ressentir.
Car si une œuvre peut susciter ce vacillement, ce léger décalage du regard, alors elle a rempli sa fonction : non pas illustrer, mais faire émerger une présence. Une mémoire partagée. Un miroir.
#JE VIENS
Le Lieu A // 68 Rue de l’hôpital militaire // Lille
Vernissage : Jeudi 05 juin 2025 à partir de 18h00
Visible du mercredi au samedi 12h-19h
Jusqu’au 28 juin 2025
Transport : Metro Rihour
Gallery A poursuit sa quête de lieux d’expositions et de collaborations pour mettre en avant les artistes qu’elle veut défendre et leur offrir un espace de monstration privilégié.
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